Friedrich Nietzsche, philosophe allemand, est notamment l’auteur des œuvres suivantes : La Naissance de la tragédie (1871), Humain, trop humain (1878), Le Voyageur et son ombre (1880), Aurore (1880-1881), Le Gai Savoir (1881-1882), Ainsi parlait Zarathoustra (1882-1885), Par-delà le bien et le mal (1886), La Généalogie de la morale (1887), sans oublier les fragments posthumes réunis sous le titre de La Volonté de Puissance (ce titre n’est pas de Nietzsche lui-même).
Nietzsche est le penseur de la volonté de puissance, conçue comme création et plénitude vitale. Ce qui est essentiel, c’est notre monde en tant qu’il est joie et volonté de puissance. Quant à l’illusion des arrière-mondes, Nietzsche la traque sous toutes ses formes.
1. Dieu est mort: le nihilisme
Nietzsche a diagnostiqué l’essence de la mortelle crise de notre temps ; il l’a décrite, en ses caractéristiques principales, et de manière quasi clinique. Il en a fait une étude à différents niveaux et, ce faisant, a, bien souvent, annoncé avec la plus grande précision ce qui s’esquissait seulement en cette fin du XIXème siècle. Cette maladie mortelle des temps modernes, la nôtre, c’est le nihilisme, règne de l’absurde, du Rien (« nihil », comme nous le signale l’étymologie). Le nihilisme, ou l’absence de sens : le devenir est alors sans but et tous les idéaux traditionnels perdent leur valeur. Mais quel est le noyau de ce « Rien » et quel est son ressort ? Le phénomène du nihilisme est fondamentalement marqué par la Mort de Dieu, le plus important des événements récents. Le soleil de la foi chrétienne vient de se coucher. Les ténèbres sont, désormais, le lot de notre monde. Le Divin, le Suprasensible, nous a quittés ; nous l’avons tué, nous dit parfois Nietzsche.
Cette mort du Dieu chrétien, si elle est aussi, peut-être, le signe et l’annonce d’une nouvelle aurore, est marquée, en notre temps, par la venue du Dernier homme, achèvement du nihilisme. Le « Dernier homme » désigne ce qu’il y a de plus méprisable en ce monde : celui qui est impuissant à créer et à aimer, l’individu totalement asservi et jouissant d’un « bonheur » programmé et mesquin. Il sautille ainsi à la surface de la terre…
2. Au-delà du projet métaphysique et des valeurs morales traditionnelles
En vérité, le nihilisme achève la métaphysique et la conclut ; il en est la conséquence immédiate. Dans la crise de notre temps — au sein même de la maladie nihiliste — nous découvrons, en effet, les erreurs de la métaphysique. Le nihilisme représente le signe du « Rien », du pur Néant : il signifie le dévoilement du Néant, conçu comme fondement caché de notre monde. Or, à l’examen, nous découvrons les origines de cette crise au sein même du projet métaphysique : la métaphysique, définie comme type de recherche et approche situant la vérité au-delà des apparences phénoménales, en un « outre-monde », dévalorise, pour cette raison, notre univers. Le phénomène sensible se trouve alors réduit à une pure apparence, à une enveloppe superficielle, il glisse vers le néant et la réalité s’identifie ainsi au suprasensible. C’est pourquoi la métaphysique doit être dépassée : elle est née, en effet, de la souffrance de l’homme et de sa lassitude de vivre. L’individu, en sa douleur, a inventé un autre monde, stable, permanent, lieu de la vérité. L’objet d’étude de la métaphysique est l’Être, en soi et par soi, substance identique à travers les changements. Mais cet être métaphysique n’est qu’une fiction, il répond seulement au besoin de stabilité de ceux que Nietzsche baptise les « hallucinés de l’arrière-monde » : ceux qui posent un univers idéal, au-delà des apparences empiriques et de notre monde phénoménal. Aux yeux de Nietzsche, ce qui compte, c’est, au contraire, notre monde, comme plénitude vitale.
Les valeurs morales traditionnelles subissent, elles aussi, le « coup de marteau » de la critique nietzschéenne. Nietzsche est, ici, très sévère à l’égard du christianisme. Le ressentiment, c’est-à-dire le sentiment de rancune et d’amertume ressenti par ceux qui sont incapables de créer positivement, a enfanté les valeurs morales, le bien et le mal. La souffrance et la rancune sont à l’origine de la morale, comme elles sont à l’origine de la métaphysique. Ceux qui ne peuvent créer et affirmer quelque chose de véritablement positif — les esclaves — se vengent de leur impuissance existentielle en érigeant en valeur le négatif de leur vie. Ainsi naît la morale chrétienne ascétique, œuvre des esclaves.
3. La Volonté de Puissance
Par le nihilisme actif, détruisant les valeurs traditionnelles pour accéder à de nouvelles valeurs, par l’immoralisme, doctrine se plaçant par-delà le bien et le mal, nous pouvons espérer retrouver le chemin de la vie créatrice et de la Volonté de Puissance.
Volonté de Puissance : voilà une expression bien galvaudée, un terme où prolifèrent les contresens majeurs ou les sophismes. Ne désignerait-elle pas purement et simplement la volonté ou l’appétit de pouvoir, l’esprit de domination ou de compétition ? Ce serait la concevoir ou la comprendre de manière très restrictive ou partielle. Elle désigne, en réalité, une force à la fois créatrice et destructrice, une poussée de domination à diverses facettes : un ensemble de pulsions essentiellement compétitives (chez le « médiocre »), mais aussi le mouvement même de la transcendance créatrice (dans l’âme noble de « l’aristocrate », c’est-à-dire du meilleur). Elle peut signifier lutte pour la vie, mais aussi plénitude spirituelle et surabondance existentielle. La Volonté de Puissance est un terme ambigu, une notion ambivalente que l’on ne saurait réduire à ses formes ou manifestations les plus superficielles ou triviales. Dans sa dimension la plus noble, c’est une force plastique et créatrice. Pour bien en saisir l’essence, c’est le corps humain qu’il faut prendre comme guide, car le corps est sagesse et raison ; définissons-le comme dynamisme intelligent, faculté organique de comprendre et de penser : tout l’organisme pense et il est permis de parler d’une pensée corporelle inconsciente. A la suite de Schopenhauer. Nietzsche réhabilite ainsi l’Inconscient, conçu comme réalité psychique dépassant la saisie claire et transparente de soi-même. La conscience est moins riche que le corps, qui fournit, en sa sagesse, un point de départ et un guide : il nous met en mesure d’appréhender la Volonté de Puissance, cette force vitale destructrice et créatrice, cette vie en perpétuelle croissance.
4. Le monde de la vie créatrice: Dionysos
La Volonté de Puissance authentique, comme affirmation et plénitude, dévoile, au sein même de sa surabondance créatrice, le véritable champ de la vie et de la transcendance. Parmi les créations de la vie figure, au premier chef, l’Art, sur lequel il importe de ne pas se méprendre. Toute une tradition identifie, en effet, l’Art avec les œuvres d’art et le domaine des beaux-arts. Nietzsche, bien au contraire, conçoit l’art sous une forme beaucoup plus globale et dynamique. Contre « l’art des œuvres d’art », circonscrit à un domaine spécifique, délimité et restreint, l’Art devient, chez Nietzsche, une invention de formes harmonieuses, une production destinée à un embellissement de toute l’existence. Il occulte les laideurs, il humanise ou dissimule tout ce qui est laid. Ne confondons pas l’Art et les Beaux-Arts. L’ensemble de matériaux et de signes créé par un artiste et manifestant un idéal de beauté ne désigne qu’un appendice de cette production de formes qu’est l’art en général, cette ivresse de la vie, cette volonté d’exister à travers des formes harmonieuses.
Le champ de la vie créatrice comprend l’activité artistique, l’authentique travail et, d’une manière générale, tout ce qui concerne l’édification positive de valeurs. Ainsi le vrai travail, mise en forme des choses, lié à la joie et au plaisir, diffère-t-il profondément du misérable labeur pour le gain. Aux puissances de la vie se rattachent aussi les authentiques valeurs morales, celles que créent les meilleurs, les « maîtres » se situant dans le courant vital de la Volonté de Puissance. La pensée de Nietzsche est, on le voit, aristocratique, au sens étymologique du terme. Au vil troupeau s’oppose la belle individualité créatrice. Cette opposition spirituelle entre « l’aristocrate » et le « troupeau » commande un certain nombre de concepts de Nietzsche. Ainsi la morale aristocratique — cet acte créateur, cette triomphale affirmation des valeurs, affirmation qui se fait dans la joie — est-elle à mille lieues de la morale des esclaves, liée au ressentiment qui enfante les valeurs négatives. Le critère « d’authenticité » apparaît toujours lié, chez Nietzsche, à l’affirmation et à la puissance créatrice de la vie.
C’est dans cette perspective — affirmation de la puissance créatrice de la vie — qu’il faut comprendre le symbole de Dionysos, qui tient une telle place chez Nietzsche, de La Naissance de la tragédie (1871), jusqu’à La Volonté de Puissance (fragments posthumes, on le sait, rassemblés sous ce titre, qui n’est pas de Nietzsche lui-même). Dionysos est, en effet, un symbole de la vie, l’être le plus débordant de vie. Dieu de l’ivresse, chez les Grecs, il incarne, dans la pensée de Nietzsche, le devenir comme destruction et création incessantes ; Dionysos est sensualité, jouissance d’une force engendrant et détruisant. Le mot « dionysiaque » exprime cette grande participation (déchaînée) au courant exubérant de la vie. Quant au dionysisme, il désigne l’identification avec le principe de l’extase et de la vie. Au contraire, Apollon, dieu de la mesure et de la limite chez les Grecs, renvoie, chez Nietzsche, à tout ce qui est net, clair, distinct, limité. Au déchaînement « dionysiaque » s’opposent la sérénité « apollinienne », l’apollinisme, conçu comme contemplation d’un monde d’imagination et de rêve.
5. Vers le surhumain
En repoussant les forces de réaction, de simple négation, celles qui sont liées au « non », en se dépassant vers celles de vie et de création, l’homme se transcende vers le Surhomme, vers un type humain supérieur, libre d’esprit et de cœur. L’homme, en effet, est-il la fin de l’évolution ? Il n’a pas achevé son itinéraire et appelle la belle individualité créatrice. Le surhumain est le sens de la terre, le terme prochain de l’évolution. Ici encore, il convient d’éviter tout contresens : le « surhomme » de Nietzsche a été tristement caricaturé, mais il n’a rien à voir avec la « bête blonde » des mythes germaniques.
La philosophie de Nietzsche s’organise ainsi autour de quelques concepts majeurs : celui de Surhumain, de Dionysiaque et, bien entendu, de Volonté de Puissance. Ajoutons-y, enfin, celui d’Éternel Retour (tout état de l’univers revient périodiquement). Nietzsche a, ainsi (comme Lucrèce ou Spinoza), dessiné une philosophie de la joie, de la création et de la plénitude vitale. Il a célébré la vie et souligné que le secret de la plus grande jouissance consiste à vivre intensément et dangereusement.
Jeunesse
Friedrich Wilhelm Nietzsche naît en 1844 à Röcken, un village au cœur de l’Allemagne. Son père, pasteur, enseigne la théologie, comme son grand-père ; il est chargé de l’éducation d’un membre de la famille royale. Il meurt des mauvaises suites d’une chute sur la tête, et un an plus tard, le frère de Nietzsche décède à son tour, alors que Friedrich n’a que 6 ans.
La famille quitte alors le village natal, pour venir s’installer dans une petite ville, Naumburg. Nietzsche souhaite continuer la tradition familiale en devenant pasteur. Il apprend le piano.
A dix ans, il entre au collège de Naumburg, mais il est si brillant qu’on l’envoie, en 1858, continuer sa scolarité à Pforta, un internat réservé aux élèves les plus doués du pays. Dans cet établissement à la discipline monacale étudia, entre autres, Fichte. Il tient, dès cet âge, un cahier relatant les détails de son enfance. Lecteur infatigable, il est assoiffé de connaissances. Il ne sait trop quel domaine d’études privilégier.
A dix-sept ans, il découvre les œuvres de Schiller et Hölderlin et aime improviser, le soir au piano. Il a le projet, vite abandonné, d’abandonner la théologie et de devenir musicien. Sa foi vacille, et il commence à souffrir de maux de tête.
Son diplôme obtenu, il s’inscrit en 1864 à l’université de Bonn, pour y suivre des études de philologie. Il participe à la vie étudiante, malgré son caractère réservé, mais reste finalement assez solitaire. Peu intéressé par ses études, ce brillant élève travaille néanmoins intensément.
Il n’y reste qu’un an, et suit son professeur Ritschl à l’université de Leipzig. Celui-ci est son mentor, mais le considère comme un génie en devenir. Là, il découvre Schopenhauer, une lecture qui le marquera profondément. Il fait également la connaissance de Wagner, une autre rencontre déterminante.
Le professeur de Bâle
Ses études terminées, il est nommé professeur de philologie à l’université de Bâle, en Suisse, en 1869. Il a alors vingt-quatre ans. Dans le cadre de son métier, il développe pendant dix ans, sa pensée au contact des nombreux ouvrages de l’Antiquité grecque, mais s’intéresse également à l’actualité philosophique de son temps.
Il noue des liens plus étroits avec Richard Wagner, dont il serait un parent éloigné. En 1872, il écrit un premier ouvrage, La Naissance de la tragédie qui recueille le soutien enthousiaste de ce dernier, mais le discrédite auprès de certains de ses confrères philologues.
Il s’engage volontairement dans l’armée pour servir en tant qu’infirmier lors de la première guerre franco-allemande.
Cette période est assombrie par plusieurs échecs ou problèmes. Il rédige les Considérations inactuelles ; cet ouvrage ne rencontre pas de succès et passe inaperçu. Il envoie à un chef d’orchestre une de ses compositions, rejetée par celui-ci. Son ancien professeur Ritschl lui fait part de sa déception de ne pas le voir devenir un professeur de philologie reconnu. Surtout en 1875, il tombe gravement malade : maux de tête qui le laissent presque aveugle, malaises, paralysie, nausées… ses proches sont très inquiets.
Suite à ces problèmes de santé, un certain cynisme s’empare aussi de lui. Il commence à critiquer la morale et ses hypocrisies. Il en discute longuement avec son ami Paul Rée, qui a lui-même écrit un livre sur le sujet : Origine des Sentiments moraux.
Il rédige un petit opuscule intitulé Richard Wagner à Bayreuth dans lequel il commence à s’éloigner du compositeur. La brouille sera bientôt définitive, et celui-ci ne répondra pas quand Nietzsche lui envoie le manuscrit d’Humain, trop humain.
Son état de santé l’empêche d’exercer convenablement son métier de professeur. En 1879, il démissionne, mais touche une pension, ce qui lui permet de voyager afin de trouver un climat plus favorable à sa guérison. Nietzsche se rend donc en Italie (Venise, Turin, Gênes), et en France (Nice) pour profiter des bienfaits du climat méditerranéen.
Le philosophe en voyage
A Gênes, il rédige Aurore, et entend l’opéra Carmen, de Bizet, qui le marque profondément. En 1882, il rencontre Lou Salomé à Rome. D’une intelligence remarquable, celle-ci sera plus tard l’amie de Freud et Rilke.
Nietzsche se rend avec elle et son ami Paul Rée en Suisse, mais les relations avec ceux-ci se dégradent, jusqu’à la brouille. Epris de la jeune fille, il aurait chargé Paul Rée de transmettre sa demande, alors que ce dernier était lui-même amoureux. Sa soeur aurait également joué un rôle néfaste, déconseillant cette union.
Il sombre dans une dépression chronique. La même année, il apprend la nouvelle de la mort de Wagner, et envoie une lettre à sa femme, malgré leur dispute.
Il achève l’écriture du Gai Savoir. Il entame alors un chantier monumental : la rédaction d’Ainsi parlait Zarathoustra. Celle-ci dure de 1882 à 1885 : elle débute à Rapallo, près de Gènes, se poursuit à Sils Maria, en Suisse, et s’achève dans la région de Nice, à Eze et Menton. Ce livre ne se vend qu’à une centaine d’exemplaires, mais il le considère comme le chef d’oeuvre de sa vie.
Les relations avec sa famille sont difficiles : déjà en froid avec sa mère, qui lui reproche d’ « avoir tué le Christ », il rompt avec sa sœur, en raison de l’antisémitisme de celle-ci et de son mari.
De 1886 à 1888, comme s’il pressentait sa folie proche, le rythme d’écriture s’accélère. Nietzsche rédige pas moins de cinq chefs d’œuvres : Par delà le Bien et le Mal, La Généalogie de la Morale, Le Crépuscule des Idoles, L’Antéchrist et Ecce Homo.
A ce moment précis, il a quarante-quatre ans, et commence à devenir célèbre. Il se met à élaborer le plan d’un nouvel ouvrage, La Volonté de puissance, qui restera inachevé.
Le basculement dans la folie
Après un séjour à Sils Maria, où sa santé se dégrade à nouveau, il rentre à Turin et est pris d’un accès de folie : le 3 janvier 1889, il se jette au cou d’un cheval qu’on fouettait et éclate en sanglots, puis tombe sans connaissance. De retour chez lui, il a des bouffées délirantes, se prend pour le successeur de Napoléon, pour Dionysos ou le Christ. Il écrit des lettres dénuées de sens à ses amis ou des inconnus.
Conduit dans un asile d’aliéné, il parle beaucoup, chante constamment, puis de moins en moins. Il semble avoir perdu le souvenir de sa vie passée, même si certains faits reviennent parfois à sa mémoire. Il demandera un jour à sa sœur « n’ai-je pas écrit de beaux livres ? ». Puis il sombre dans un état végétatif et un silence quasi-complet jusqu’à sa mort.
On ne sait si sa maladie résulte d’une syphilis, d’une tumeur au cerveau, de troubles nerveux héréditaires ou de drogues dangereuses prises pour soulager ses maux de têtes.
Soigné par sa mère puis sa sœur, il meurt au tournant du siècle, en 1900, inconscient de sa célébrité.
L’auteur et son oeuvre
Nietzsche et Sur la Vérité et le mensonge
On définit souvent la philosophie comme interrogation sur le sens de la vie. Mais le fait de se poser la question de la valeur de la vie implique qu’il existe un point de vue supérieur à elle, à partir duquel on pourrait la condamner ou l’absoudre. Or, la vie ne peut être jugée, parce qu’elle est la source de toutes les valeurs. Voilà le postulat central de la pensée nietzschéenne.
Friedrich Nietzsche est né en Allemagne. Il abandonne très tôt la carrière de professeur de grec pour une vie de philosophe solitaire, errant à travers l’Europe, en marge des institutions universitaires. Tourmenté par une atroce migraine chronique, il rédige chaque jour de brefs aphorismes qu’il rassemble ensuite pour en faire des livres, jusqu’à la crise de démence qui le frappe en pleine rue à Turin en 1888 et le condamne au silence jusqu’à sa mort.
Dès ses premières œuvres, auxquelles appartient la dissertation Sur la vérité et le mensonge écrite en 1873, il adopte une nouvelle façon de philosopher, « à coups de marteau », qui remet en cause toutes les valeurs établies de la morale, de la religion, de la science et de la politique. Mais le philosophe selon Nietzsche ne doit pas se borner à critiquer les valeurs frelatées. Il doit en faire la généalogie, c’est-à-dire chercher ce qui les a inspirées. Par exemple, si le libre arbitre a des partisans, qui tiennent à déclarer l’homme responsable de ses choix et de ses actes, c’est l’effet de leur désir morbide de châtier des coupables.
C’est pour la même raison que Nietzsche estime insuffisante la critique à laquelle Kant avait soumis la raison. En lui reprochant de s’égarer dans l’illusion, ce dernier ne remettait pas en cause l’idéal de vérité auquel toute la philosophie depuis Socrate voue un véritable culte. En effet, pourquoi faudrait-il préférer la vérité? L’illusion n’est-elle pas un meilleur moyen de défense pour ce chétif animal qu’est l’homme ?
D’ailleurs tous nos concepts sont illusoires, et cela parce qu’ils ont pour origine les mots à partir desquels ils sont formés. C’est le langage qui est la principale source d’illusion. D’abord, comme il répond à un besoin social de transmettre tout ce qui est facilement communicable, il condamne notre pensée au superficiel et au banal. Ensuite, comme nous sommes habitués à classer les choses à l’aide des cadres du langage humain, nous ne nous rendons pas compte que ce que nous prenons pour la réalité, ce n’est que sa mise en forme humaine, « trop humaine » comme dit Nietzsche. Enfin, le langage induit dans notre pensée toute une métaphysique puisque les idées générales, simples commodités de la communication, finissent par devenir, comme chez Platon par exemple, les modèles idéaux de la réalité. C’est pourquoi seul un usage artiste du langage pourrait libérer les forces de la vie de la servitude à laquelle la philosophie et la science les ont réduites.
Oeuvres
Écrits de jeunesse
– Aus meinem Leben – 1858
– Über Musik – 1858
– Napoleon III als Praesident – 1862
– Fatum und Geschichte – 1862
– Willensfreiheit und Fatum (Liberté de la Volonté et Fatum) – 1862
– Kann der Neidische je wahrhaft glücklich sein ? – 1863
– Über Stimmungen (Sur les Tonalités de l’Âme) – 1864
– Dem unbekannten Gotte (Au dieu inconnu) – 1864
– Mein Leben – 1864
Philosophie
– Homer und die klassische Philologie (Homère et la philologie classique) – 1869
– Le Drame musical grec (conférence) – 1870
– Socrate et la tragédie (conférence) – 1870
– La Conception dionysiaque du monde – 1870
– Über die Zukunft unserer Bildungsanstalten (Sur l’avenir de nos établissements d’enseignement, conférences) – 1872
– Fünf Vorreden zu fünf ungeschriebenen Büchern (Cinq préfaces à cinq livres qui n’ont pas été écrits) : I. Über das Pathos der Wahrheit (La Passion de la vérité) ; II. Gedanken über die Zukunft unserer Bildungsantstalten (Réflexions sur l’avenir de nos établissements d’enseignement) ; III. Der griechische Staat (L’État chez les Grecs) ; IV. Das Verhältnis der Schopenhauerischen Philosophie zu einer deutschen Cultur (Le Rapport de la philosophie de Schopenhauer à une culture allemande) ; V. Homer’s Wettkampf (La joute chez Homère) – 1872
– Die Geburt der Tragödie aus dem Geiste der Musik (La Naissance de la tragédie) – 1ère édition 1872 / 2ème édition 1886
– Un mot de nouvel An au rédacteur de l’hebdomadaire « Im neuen Reich » (publié dans Musikalisches Wochenblatt) – 1873
– Cours de rhétorique – 1873
– Über Wahrheit und Lüge im aussermoralischen Sinn (Vérité et mensonge au sens extra-moral) – 1873
– Die Philosophie im tragischen Zeitalter der Griechen (La philosophie à l’époque tragique des Grecs) – 1873
– Unzeitgemässe Betrachtungen (Considérations inactuelles) : I. David Strauss, l’apôtre et l’écrivain ; II. De l’utilité et des inconvénients de l’histoire pour la vie ; III. Schopenhauer éducateur ; IV. Richard Wagner à Bayreuth – 1873 à 1876
– Menschliches, Allzumenschliches. Ein Buch für freie Geister (Humain, trop humain. Un livre pour esprits libres) – 1878
– Vermischte Meinungen und Sprüche (Opinions et sentences mêlées) – 1878
– Der Wanderer und sein Schatten (Le Voyageur et son ombre) – 1878
– Morgenröte. Gedanken über die moralischen Vorurtheile (Aurore. Pensées sur les préjugés moraux) – 1881
– Die fröhliche Wissenschaft « la gaya scienza » (Le Gai Savoir « la gaya scienza ») – 1882
– Also sprach Zarathustra. Ein Buch für Alle und Keinen (Ainsi parla Zarathoustra. Un livre pour tous et pour personne) – 1885
– Jenseits von Gut und Böse. Vorspiel einer Philosophie der Zukunft (Par-delà bien et mal. Prélude d’une philosophie de l’avenir) – 1886
– Zur Genealogie der Moral. Eine Streitschrift (Généalogie de la morale. Un écrit polémique) – 1887
– Götzen-Dämmerung oder wie man mit dem Hammer philosophiert (Le Crépuscule des idoles, ou comment philosopher à coup de marteau) – 1888
– Der Antichrist. Fluch auf das Christenthum (L’Antéchrist. Imprécation contre le christianisme) – 1888 (publié 1895)
– Ecce Homo. Wie man wird, was man ist (Ecce homo. Comment on devient ce que l’on est) – 1888
– Der Fall Wagner. Ein Musikanten-Problem (Le Cas Wagner) – 1888
– Nietzsche contra Wagner (Nietzsche contre Wagner) – 1889
– La Volonté de puissance – 1901 (Posthume)
– Fragments posthumes
Philologie
– De fontibus Laertii Diogenii
– Über die alten hexametrischen Nomen
– Über die Apophthegmata und ihre Sammler
– Über die literarhistorischen Quellen des Suidas
– Über die Quellen der Lexikographen
Poésie
– Idyllen aus Messina
– Dionysos-Dithyramben
– Poésies diverses
« Celui qui sait commander trouve toujours ceux qui doivent obéir. » — La Volonté de puissance
« Connaître, c’est comprendre toute chose au mieux de nos intérêts. » — La Volonté de puissance
« L’homme a besoin de ce qu’il y a de pire en lui s’il veut parvenir à ce qu’il a de meilleur. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« La maturité de l’homme, c’est d’avoir retrouvé le sérieux qu’on avait au jeu quand on était enfant. » — Par-delà le bien et le mal
« Si ton oeil était plus aigu tu verrais tout en mouvement. » —
« Aussitôt qu’on nous montre quelque chose d’ancien dans une innovation, nous sommes apaisés. » —
« L’état qui engendre la règle est différent de celui que la règle engendre. » —
« Qui vit de combattre un ennemi a tout intérêt de le laisser en vie. » — Humain, trop humain
« La conscience est la dernière et la plus tardive évolution de la vie organique, et par conséquent ce qu’il y a de moins accompli et de plus fragile en elle. » —
« Vouloir le vrai, c’est s’avouer impuissant à le créer. » —
« Tu vois les hautes tours s’élever au-dessus des maisons seulement quand tu as quitté la ville. » —
« La femme n’est pas encore capable d’amitié : elle ne connaît que l’amour. » —
« Pour le fort rien n’est plus dangereux que la pitié. » —
« On veut la liberté aussi longtemps qu’on n’a pas la puissance ; mais si on a la puissance, on veut la suprématie. » —
« La folie est quelque chose de rare chez l’individu ; elle est la règle pour les groupes, les partis, les peuples, les époques. » —
« L’homme est quelque chose qui doit être dépassé. » —
« Il y a toujours un peu de folie dans l’amour mais il y a toujours un peu de raison dans la folie. » —
« Être vrai, peu le peuvent ! » —
« Dieu aussi a son enfer : c’est son amour des hommes. » —
« Ne dépouillez pas la femme de son mystère. » —
« Qui se sait profond tend vers la clarté; qui veut le paraître vers l’obscurité ; car la foule tient pour profond tout ce dont elle ne peut voir le fond. » —
« Plus nous nous élevons et plus nous paraissons petits à ceux qui ne savent pas voler. » —
« Tout individu collabore à l’ensemble du cosmos. » —
« Que d’hommes se pressent vers la lumière non pas pour voir mieux, mais pour mieux briller. » — Le voyageur et son Ombre
« Ah ! Il y a tant de choses entre le ciel et la terre que les poètes sont seuls à avoir rêvées. » —
« De quel désert est entouré le génie ! » —
« Souviens-toi d’oublier. » —
« Ma joie de donner est morte à force de donner. » —
« Chaque mot est un préjugé. » —
« L’auteur doit céder la parole à son oeuvre. » —
« En vérité, les convictions sont plus dangereuses que les mensonges. » —
« Si l’on te décerne des louanges, c’est que tu ne suis pas ta propre vie, mais celle d’un autre. » — Humain, trop humain
« Des femmes peuvent très bien lier amitié avec un homme ; mais pour la maintenir – il y faut peut-être le concours d’une petite antipathie physique. » —
« Toute communauté – un jour, quelque part, d’une manière ou d’une autre – rend « commun ». » — Le gai savoir
« La musique offre aux passions le moyen de jouir d’elles-mêmes. » — Le gai savoir
« L’État est le plus froid des monstres froids. Il ment froidement ; et voici le mensonge qui s’échappe de sa bouche : « Moi l’État, je suis le peuple. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Dans la vengeance et en amour, la femme est plus barbare que l’homme. » — Par-delà le bien et le mal
« L’homme est une corde tendue entre l’animal et le Surhomme, une corde au-dessus d’un abîme. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Sans la musique, la vie serait une erreur. » — Le crépuscule des idoles
« Formule de mon bonheur : un « oui », un « non », une ligne droite, un but… » — Le crépuscule des idoles
« Le langage est-il l’expression adéquate de toutes les réalités ? » — Le livre du philosophe
« Il est bien des choses que je veux une foi pour toutes, ne point savoir. La sagesse fixe des limites même à la connaissance. » — Le crépuscule des idoles
« La vie a besoin d’illusions, c’est-à-dire de non-vérités tenues pour des vérités. » — Le livre du philosophe
« Croyez-moi ! Le secret pour récolter la plus grande fécondité, la plus grande jouissance de l’existence, consiste à vivre dangereusement ! » — Le gai savoir
« Les vérités sont des illusions dont on a oublié qu’elles le sont. » — Le livre du philosophe
« Je suis trop fier pour croire qu’un homme m’aime. Cela supposerait qu’il sache qui je suis. » — Lettre
« Les grandes guerres modernes sont la conséquence des études historiques. » — Aurore
« Dans le véritable amour, c’est l’âme qui enveloppe le corps. » —
« Le mariage est une longue conversation. » —
« Tout amour pense à l’instant et à l’éternité, mais jamais à la durée. » —
« Entre amis, il est si beau que le silence soit d’or, mais le rire bon et frais l’est beaucoup plus encore. » —
« Celui qui ne veut agir et parler qu’avec justesse finit par ne rien faire du tout. » —
« L’architecte est une sorte d’oratoire de la puissance au moyen des formes. » — Le crépuscule des idoles
« Les femmes deviennent par amour tout-à-fait ce qu’elles sont dans l’idée des hommes dont elles sont aimées. » —
« La plupart des hommes sont bien trop occupés d’eux-mêmes pour être méchants. » — Humain, trop humain
« On n’attaque pas seulement pour faire du mal à quelqu’un mais peut-être aussi pour le seul plaisir de prendre conscience de sa force. » — Humain, trop humain
« La souffrance d’autrui est chose qui doit s’apprendre : et jamais elle ne peut être apprise pleinement. » — Humain, trop humain
« On amène les gens courageux à une action en la leur exposant plus périlleuse qu’elle ne l’est. » —
« Les gens qui nous donnent leur pleine confiance croient par là avoir un droit sur la nôtre. C’est une erreur de raisonnement ; des dons ne sauraient donner un droit. » — Humain, trop humain
« Mieux vaut ne rien savoir que beaucoup savoir à moitié ! » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Plus abstraite est la vérité que tu veux enseigner, plus tu dois en sa faveur séduire les sens. » — Par-delà le bien et le mal
« Nos devoirs – ce sont les droits que les autres ont sur nous. » — Aurore
« La familiarité irrite chez un supérieur, parce qu’on ne peut la lui rendre. » — Par-delà le bien et le mal
« Qu’est-ce que le génie ? – Avoir un but élevé et vouloir les moyens d’y parvenir. » — Humain, trop humain
« Danses avec les pieds, avec les idées, avec les mots, et dois-je aussi ajouter que l’on doit être capable de danser avec la plume ? » — Le crépuscule des idoles
« Il est difficile de vivre avec des humains, parce qu’il est difficile de se taire. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Vouloir libère. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Nul vainqueur ne croit au hasard. » — Le gai savoir
« Un homme paraît avoir du caractère beaucoup plus souvent parce qu’il suit toujours son tempérament que parce qu’il suit toujours ses principes. » — Par-delà le bien et le mal
« Le danseur n’a-t-il pas ses oreilles dans ses orteils ! » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Celui qui loue fait semblant de rendre, mais, en vérité, il veut qu’on lui donne ! » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Et souvent il y a plus de bravoure à se retenir et à passer : pour se réserver pour un ennemi plus digne. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Tout ce qui a son prix est de peu de valeur. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Faites donc ce que vous voulez – mais soyez d’abord de ceux qui peuvent vouloir ! » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Ce que je préférerais, c’est d’aimer la terre comme l’aime la lune et de n’effleurer sa beauté que des yeux. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Deviens ce que tu es. Fais ce que toi seul peut faire. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« L’ami doit être passé maître dans l’art de deviner et dans l’art de se taire. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Et souvent il y a plus de bravoure à se retenir et à passer : pour se réserver pour un ennemi plus digne. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Tout ce qui a son prix est de peu de valeur. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Faites donc ce que vous voulez – mais soyez d’abord de ceux qui peuvent vouloir ! » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Ce que je préférerais, c’est d’aimer la terre comme l’aime la lune et de n’effleurer sa beauté que des yeux. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Deviens ce que tu es. Fais ce que toi seul peut faire. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« L’ami doit être passé maître dans l’art de deviner et dans l’art de se taire. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Jamais encore la vérité ne s’est accrochée au bras d’un intransigeant. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Créer – voilà la grande délivrance de la souffrance, voilà ce qui rend la vie légère. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Il faut retenir son coeur, car si on le laissait aller, combien vite, alors, on perdrait la tête ! » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Qui ne croit en lui-même, ment toujours. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Les explications mystiques sont considérées comme profondes ; en réalité il s’en faut de beaucoup qu’elles soient même superficielles. » — Le gai savoir
« On paie mal un maître en ne restant toujours que l’élève. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Les poètes n’ont pas la pudeur de ce qu’ils vivent : ils l’exploitent. » — Par-delà le bien et le mal
« Quiconque a sondé le fond des choses devine sans peine quelle sagesse il y a à rester superficiel. C’est l’instinct de conservation qui apprend à être hâtif, léger et faux. » — Par-delà le bien et le mal
« Avec une voix forte dans la gorge, on est presque incapable de penser des choses subtiles. » — Le gai savoir
« Rire, c’est se réjouir d’un préjudice, mais avec bonne conscience. » — Le gai savoir
« Le défaut le plus répandu de notre type de formation et d’éducation : personne n’apprend, personne n’aspire, personne n’enseigne… à supporter la solitude. » — Aurore
« L’augmentation de la sagesse se laisse mesurer exactement d’après la diminution de bile. » — Humain, trop humain
« Les auteurs les plus spirituels produisent le plus imperceptible des sourires. » — Humain, trop humain
« Notre prochain, ce n’est pas notre voisin, c’est le voisin du voisin. » —
« On en vient à aimer son désir et non plus l’objet de son désir. » —
« La culture, c’est avant tout une unité de style qui se manifeste dans toutes les activités d’une nation. » —
« Le mauvais goût a son droit autant que le bon goût. » —
« Le futur appartient à celui qui a la plus longue mémoire. » —
« Le luxe est une forme de triomphe permanent sur tous ceux qui sont pauvres, arriérés, impuissants, malades, inassouvis. » —
« Quand on a la foi, on peut se passer de la vérité. » —
« La femme est la seconde faute de Dieu. » —
« On ment bien de la bouche, mais avec la gueule qu’on fait en même temps, on dit la vérité quand même. » —
« Tu veux te décupler, te centupler ? Trouve des zéros. » —
« Ce sont les paroles les moins tapageuses qui suscitent la tempête et les pensées qui mènent le monde viennent sur des pattes de colombe. » — Le gai savoir
« Beaucoup de brèves folies, c’est là ce que vous appelez l’amour. Et votre mariage met fin à beaucoup de brèves folies par une longue sottise. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Promesse de la science : la science moderne a pour but aussi peu de douleur que possible. » — Humain, trop humain
« Vénérez la maternité, le père n’est jamais qu’un hasard. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« L’égoïsme est cette loi de la perspective du sentiment d’après laquelle les choses les plus proches sont les plus grandes et les plus lourdes alors que toutes celles qui s’éloignent diminuent de taille et de poids. » — Le gai savoir
« A force de vouloir rechercher les origines, on devient écrevisse. L’historien voit en arrière ; il finit par croire en arrière. » — Le crépuscule des idoles
« Voilà un envieux : ne lui souhaitez pas d’enfants ; il serait jaloux d’eux parce qu’il ne peut plus avoir leur âge. » — Le gai savoir
« Le ver se recroqueville quand on marche dessus. C’est plein de sagesse. Par là il amoindrit la chance de se faire de nouveau marcher dessus. Dans le langage de la morale : l’humilité. » — Le crépuscule des idoles
« Contre maint défenseur. La plus perfide façon de nuire à une cause est de la défendre intentionnellement avec de mauvaises raisons. » — Le gai savoir
« On ne reste parfois fidèle à une cause que parce que ses adversaires ne cessent d’être insipides. » — Humain, trop humain
« Le serpent qui ne peut changer de peau, meurt. Il en va de même des esprits que l’on empêche de changer d’opinion : ils cessent d’être esprit. » — Aurore
« Les convictions sont des ennemis de la vérité plus dangereux que les mensonges. » — Humain, trop humain
« Nous apprécions les services que quelqu’un nous rend d’après la valeur qu’il y attache, non d’après celle qu’ils ont pour nous. » — Humain, trop humain
« L’art rend supportable l’aspect de la vie en plaçant dessus le crêpe de la pensée indécise. » — Humain, trop humain
« L’avantage de la mauvaise mémoire est qu’on jouit plusieurs fois des mêmes choses pour la première fois. » — Humain, trop humain
« L’acteur n’éprouve pas le sentiment qu’il exprime. Il serait perdu, s’il l’éprouvait. » — La Volonté de puissance
« Jadis le moi se cachait dans le troupeau ; à présent, le troupeau se cache encore au fond du moi. » — La Volonté de puissance
« Le concubinage, lui aussi, a été corrompu – par le mariage. » — Par-delà le bien et le mal
« Les insectes piquent, non par méchanceté, mais parce que, eux aussi, veulent vivre ; il en est de même des critiques ; ils veulent notre sang et non pas notre douleur. » — Le Voyageur et son ombre
« Ce qu’il y a d’essentiel et d’inappréciable dans toute la morale, c’est qu’elle est une contrainte prolongée. » — Par-delà le bien et le mal
« La vertu reste le plus coûteux des vices, il faut qu’elle le reste. » — La Volonté de puissance
« Nos défauts sont les yeux par lesquels nous voyons l’idéal. » — Le Voyageur et son ombre
« Quand il nous faut changer d’opinion au sujet de quelqu’un, nous lui comptons cher l’embarras qu’il nous cause. » — Par-delà le bien et le mal
« Le mariage est la forme la plus menteuse des relations sexuelles ; c’est pourquoi il jouit de l’approbation des consciences pures. » —
« Dans la plupart des amours, il y en a un qui joue et l’autre qui est joué ; Cupidon est avant tout un petit régisseur de théâtre. » —
« La connaissance est pour l’humanité un magnifique moyen de s’anéantir elle-même. » —
« Une belle femme a tout de même quelque chose de commun avec la vérité : toutes deux donnent plus de bonheur lorsqu’on les désire que lorsqu’on les possède. » —
« Les singes sont bien trop bons pour que l’homme puisse descendre d’eux. » —
« Atteindre son idéal, c’est le dépasser même coupé. » —
« Nous ne nous sommes jamais cherchés – comment donc se pourrait-il que nous nous découvrions un jour? » — La généalogie de la morale
« Es-tu un esclave ? Tu ne peux donc pas être un ami. Es-tu un tyran ? Tu ne peux donc pas avoir d’amis. » —
« Plutôt une inimitié d’un bloc qu’une amitié faite de bois recollé. » —
« Ce qui ne me détruit pas me rend plus fort. » —
« Au fond, il n’y a qu’un seul chrétien, et il est mort sur la croix. » —
« Ce qu’on fait par amour l’est toujours par-delà le bien et le mal. » — Par-delà le Bien et le Mal
« Chaque homme cache en lui un enfant qui veut jouer. » —
« Je déteste les âmes étroites : il n’y a là rien de bon et presque rien de mauvais. » —
« Quiconque lutte contre des monstres devrait prendre garde, dans le combat, à ne pas devenir monstre lui-même. Et quant à celui qui scrute le fond de l’abysse, l’abysse le scrute à son tour. » — Par-delà le bien et le mal
« Il est plus facile de renoncer à une passion que de la maîtriser. » —
« On oublie sa faute quand on l’a confessée à un autre, mais d’ordinaire l’autre ne l’oublie pas. » — Humain, trop humain
« La femme qui se sait joliment parée ne s’est jamais enrhumé. » — Le crépuscule des idoles
« Dieu est une pensée qui rend courbe ce qui est droit, fait tourner ce qui est immobile. » —
« Dans toute morale ascétique, l’homme adore une part de soi-même sous les espèces de Dieu, et il a besoin pour cela de changer en diable la part qui reste… » — Humain, trop humain
« Que dire ? L’homme n’est qu’une méprise de Dieu ? Ou bien Dieu une méprise de l’homme ? » — Le crépuscule des idoles
« Quand on ne trouve plus la grandeur de Dieu, on ne la trouve plus nulle part, il faut la nier ou la créer. » —
« On ne sait, si Dieu doit avoir plus de reconnaissance à l’égard du diable, ou le diable plus de reconnaissance à l’égard de Dieu, de ce que tout se soit ainsi passé. » — Opinions et sentences mêlées
« S’il y a un Dieu, comment supporter de ne l’être pas ? » —
« Dieu a aussi son enfer : c’est son amour des hommes. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« A trop admirer les vertus des autres on peut perdre le sens des siennes propres tant et si bien qu’en ne les exerçant plus, on les oublie complètement sans recevoir pour autant celles des autres en compensation. » — Humain, trop humain
« Un peu de santé par-ci, par-là, c’est pour le malade le meilleur remède. » — Humain, trop humain
« Vivre, c’est repousser quelque chose qui veut mourir. » —
« Celui qui nie sa propre vanité la possède généralement sous une forme si brutale qu’il ferme instinctivement les yeux devant elle pour ne pas avoir à se mépriser. » — Humain, trop humain
« La fortune ne devrait être possédée que par les gens d’esprit : autrement, elle représente un danger public. » — Humain, trop humain
« L’homme est une chose qui doit être surpassée. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Traiter tous les hommes avec la même bienveillance et prodiguer indistinctement sa bonté peut tout aussi bien témoigner d’un profond mépris des hommes que d’un amour sincère à leur égard. » — Humain, trop humain
« La jalousie qui se tait s’accroît dans le silence. » — Humain, trop humain
« L’amitié naît lorsqu’on a pour l’autre une estime supérieure à celle qu’on a pour soi-même. » — Humain, trop humain
« Accepter d’autrui qu’il subvienne à des besoins nombreux et même superflus, et aussi parfaitement que possible, finit par vous réduire à un état de dépendance. » — Humain, trop humain
« La colère vide l’âme de toutes ses ressources, de sorte qu’au fond paraît la lumière. » — Humain, trop humain
« Qu’est-ce donc que l’amour, si ce n’est de se comprendre et de se réjouir en voyant quelqu’un d’autre vivre, agir et sentir différemment de nous, parfois même à l’opposé ? » — Humain, trop humain
« Tous ceux que nous avons longtemps fait attendre dans l’antichambre de notre faveur finissent par fermenter et succomber à l’aigreur. » — Humain, trop humain
« Le mariage met fin à beaucoup de brèves folies par une longue sottise. » —
« Ce n’est pas le doute, c’est la certitude qui rend fou. » — Ecce Homo
« Les pensées sont les ombres de nos sentiments. » —
« Pour celui qui est très seul, le bruit est déjà une consolation. » —
« Féconder le passé en engendrant l’avenir, tel est le sens du présent. » —
« Les unions qui sont conclues par amour ont l’erreur pour père et la nécessité pour mère. » — Humain, trop humain
« Le fanatisme est la seule forme de volonté qui puisse être insufflée aux faibles et aux timides. » —
« Que dit ta conscience ? Tu dois devenir l’homme que tu es. » — Le gai savoir
« Quelque dévêtue qu’elle puisse être, une jolie femme ne prend jamais froid, pour peu qu’elle ait le sentiment d’être en beauté. » —
« On est le plus en danger d’être écrasé lorsqu’on vient d’esquiver une voiture. » — Humain, trop humain
« Le christianisme et l’alcool, les deux plus grands agents de corruption. » — L’Antéchrist
« Ce qui se dit la nuit ne voit jamais le jour. » —
« La morale n’est qu’une interprétation – ou plus exactement une fausse interprétation – de certains phénomènes. » — Le crépuscule des idoles
« L’individu bien conforme est taillé d’un bois à la fois dur, tendre et parfumé. » —
« L’homme a créé le péché et il repousserait cet enfant unique rien que parce qu’il déplaît à Dieu, le grand-père du péché ? » — Aurore
« Ce qu’on fait n’est jamais compris mais seulement loué ou blâmé. » — Le gai savoir
« Les convictions sont des prisons. » — L’Antéchrist
« Cette femme est belle et intelligente : hélas, combien elle serait devenue plus intelligente si elle n’était pas belle. » —
« Le bonheur est une femme. » —
« La vie sans musique est tout simplement une erreur, une fatigue, un exil. » —
« Jusqu’à présent toute grande philosophie fut la confession de son auteur, une sorte de mémoires involontaires. » — Par-delà le Bien et le Mal
« La vérité est une femme : ses voiles, ses pudeurs et ses mensonges lui appartiennent essentiellement. » —
« Les métaphysiciens, ces albinos de la pensée, les plus blêmes parmi les êtres pâles. » — L’Antéchrist
« Le sérieux, ce symptôme évident d’une mauvaise digestion. » —
« La femme est une surface qui mime la profondeur. » —
« La philosophie est à mes yeux un explosif effroyable qui met tout en danger. » —
« La joie de ceux qui prennent, je ne la connais pas, et j’ai rêvé souvent qu’il devait être plus doux encore de voler que de prendre. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« C’est bien un signe de l’astuce des femmes qu’elles aient su presque partout sa faire entretenir, comme des frelons dans la ruche. » —
« Nous ne croyons pas que la vérité reste encore vérité quand on lui enlève ses voiles. » —
« Puisse chacun avoir la chance de trouver justement la conception de la vie qui lui permet de réaliser son maximum de bonheur. » — Aurore
« Au fond du coeur, l’homme n’est que méchant ; mais au fond du coeur, la femme est mauvaise. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Plaisir : sensation d’un accroissement de puissance. » — La Volonté de puissance
« Observer la démarche des plus belles Anglaises : on ne trouve en aucun pays du monde de plus beaux canards ni de plus beaux dindons… » — Par-delà le bien et le mal
« Le châtiment est fait pour améliorer celui qui châtie. » — Le gai savoir
« La volonté est, pour tout ce qui est passé, un méchant spectateur. » —
« Toute forme d’absolu relève de la pathologie. » —
« La mère de la débauche n’est pas la joie mais l’absence de joie. » —
« L’homme est-il une erreur de Dieu, ou Dieu une erreur de l’homme ? » —
« Les principes servent à tyranniser, justifier, honorer, vilipender ou dissimuler les habitudes ; deux hommes qui ont au fond les mêmes principes peuvent les faire servir à des fins radicalement différentes. » —
« Certains ne parviennent pas à devenir des penseurs parce que leur mémoire est trop bonne. » —
« Les conditions nouvelles qui entraîneront en gros l’apparition d’hommes tous pareils et pareillement médiocres sont éminemment propres à donner naissance à des hommes d’exception du genre le plus dangereux et le plus séduisant. » —
« La pensée du suicide est une puissante consolation, elle aide à passer plus d’une mauvaise nuit. » —
« Le fourreau doré de la compassion cache parfois le poignard de l’envie. » —
« On s’est mis d’accord pour considérer qu’avoir beaucoup de critiques, c’est un succès. » — Considérations inactuelles
« Il y a une innocence dans le mensonge qui est signe de bonne foi. » —
« Les hommes aux pensées profondes, dans leurs rapports avec les autres hommes, ont toujours l’impression d’être des comédiens, parce qu’ils sont forcés, pour être compris, de simuler une superficie. » —
« Limites de notre ouïe – On n’entend que les questions auxquelles on est en mesure de trouver une réponse. » —
« Il est plus facile de s’arranger avec sa mauvaise conscience qu’avec sa mauvaise réputation. » —
« La métaphysique, la morale, la religion, la science, sont considérées comme des formes diverses de mensonge : il faut leur aide pour croire à la vie. » —
« C’est de nos vertus que nous sommes le mieux punis. » —
« La vanité d’autrui n’offense notre goût que lorsqu’elle choque notre propre vanité. » —
« Quel est le sceau de la liberté acquise ? Ne plus avoir honte de soi-même. » —
« Le génie réside dans l’instinct. » — La Volonté de Puissance
« Ce sont les hommes les plus sensuels qui doivent fuir devant les femmes et torturer leur corps. » —
« La terre est comme la poitrine d’une femme : utile autant qu’agréable. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« La valeur d’une chose réside parfois non dans ce qu’on en tire mais dans ce qu’on paie pour elle, dans ce qu’elle nous coûte. » —
« Il faut avoir besoin d’esprit pour arriver à avoir de l’esprit. » — Le crépuscule des idoles
« Il y a quelque chose à dire en faveur de l’exception, pourvu qu’elle ne veuille jamais devenir la règle. » —
« La valeur d’une chose réside parfois non dans ce qu’on gagne en l’obtenant, mais dans ce qu’on paye pour l’acquérir, dans ce qu’elle coûte. » —
« Parler beaucoup de soi peut être un moyen de se dissimuler. » —
« Le droit des autres est une concession faite par notre sentiment de puissance au sentiment de puissance de ces autres. » — Aurore
« Le verdict du passé est toujours le verdict d’un oracle. Vous ne le comprendrez que si vous êtes les architectes de l’avenir, les connaisseurs du présent. » — Considérations inactuelles
« Peut-être même dans le fameux amour maternel y a-t-il une bonne part de curiosité. » — Humain, trop humain
« Personne peut-être n’a jamais été assez sincère pour définir la sincérité. » —
« Seul ce qui ne cesse de nous faire souffrir reste dans la mémoire. » — Généalogie de la morale
« Tout acte exige l’oubli. » — Considérations inactuelles
« On se refuse de croire aux sottises des hommes intelligents ; quelle entorse aux droits de l’homme ! » —
« Il est possible de vivre sans se souvenir et de vivre heureux, comme le démontre l’animal, mais il est impossible de vivre sans oublier. » — Généalogie de la morale
« Les avocats d’un criminel sont rarement assez artistes pour utiliser, au profit du coupable, la beauté terrible de son acte. » — Par-delà le bien et le mal
« L’étroite voie de notre ciel propre passe toujours par la volupté de notre propre enfer. » —
« Ce qui détruit les illusions, les siennes et celles des autres, la nature le punit avec toute la rigueur d’un tyran. » — Considérations inactuelles
« L’effort des philosophes tend à comprendre ce que les contemporains se contentent de vivre. » — La naissance de la philosophie à l’époque de la tragédie grecque
« Ce n’est pas le moindre charme d’une théorie que d’être réfutable. » — Par-delà le bien et le mal
« La libéralité n’est souvent qu’une sorte de timidité. » — Le gai savoir
« La souffrance d’autrui est chose qui doit s’apprendre. » — Humain, trop humain
« La vie n’est qu’une variété de la mort, et une variété très rare. » — Le gai savoir
« Un concept est une invention à laquelle rien ne correspond exactement, mais à laquelle nombre de choses ressemblent. » —
« De tout temps on a pris les « beaux sentiments » pour des arguments. » — La Volonté de puissance
« On ne saurait être l’homme de sa spécialité que si l’on est aussi sa victime. » — Le gai savoir
« Méfiez-vous de tous ceux en qui l’instinct de punir est puissant. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Les hommes d’action roulent comme roule la pierre, conformément à l’absurdité de la mécanique. » — Humain, trop humain
« A lutter avec les mêmes armes que ton ennemi, tu deviendras comme lui. » —
« L’artiste a le pouvoir de réveiller la force d’agir qui sommeille dans d’autres âmes. » — Le gai savoir
« La cruauté est le remède de l’orgueil blessé. » — Le gai savoir
« C’est perdre de sa force que compatir. » — l’Antéchrist
« Quel est le grand dragon que l’esprit ne veut plus appeler ni Dieu ni maître ? « Tu dois » s’appelle le grand dragon. Mais l’esprit du lion dit : « Je veux ». » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Rien de bon n’est jamais sorti des reflets de l’esprit se mirant en lui-même. Ce n’est que depuis que l’on s’efforce de se renseigner sur tous les phénomènes de l’esprit en prenant le corps pour fil conducteur, que l’on commence à progresser. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Tu dois devenir l’homme que tu es. Fais ce que toi seul peux faire. Deviens sans cesse celui que tu es, sois le maître et le sculpteur de toi-même. » —
« Jusqu’à ce jour rien de ce qui donne de la couleur à l’existence n’a encore eu son histoire. » — Le Gai Savoir
« Toute l’histoire du monde se conçoit comme la biographie d’un seul homme. » —
« Dès que l’homme s’est parfaitement identifié à l’humanité, il meut la nature entière. » — La Volonté de puissance
« La résolution chrétienne de considérer le monde comme laid et mauvais a rendu le monde laid et mauvais. » — Le gai savoir
« Celui qui ne dispose pas des deux tiers de sa journée pour lui-même est un esclave, qu’il soit d’ailleurs ce qu’il veut : politique, marchand, fonctionnaire, érudit. » — Humain, trop humain
« L’homme souffre si profondément qu’il a dû inventer le rire. » —
« Ce qui se paie n’a guère de valeur ; voilà la croyance que je cracherai au visage des esprits mercantiles. » — La Volonté de puissance
« Le poison dont meurt une nature plus faible est un fortifiant pour le fort. » — Le gai savoir
« Rêver de la vie, c’est justement ce que j’appelle : « être éveillé ». » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Toute Eglise est la pierre sur le tombeau d’un Homme-Dieu ; elle veut à tout prix l’empêcher de ressusciter. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Je fais cas d’un philosophe dans la mesure où il est capable de fournir un exemple. » — Considérations inactuelles
« Nous cependant, nous voulons être les poètes de notre vie, et cela avant tout dans les plus petites choses quotidiennes. » — Le gai savoir
« Le théâtre, ce n’est jamais qu’une manifestation au-dessous de l’art, quelque chose qui s’adapte au goût des masses, lorsqu’on le fausse pour elles. » — Le cas Wagner
« Ne sais-tu pas que dans chacune de tes actions, l’histoire entière du devenir se répète en abrégé ? » — La Volonté de puissance
« Il faut savoir se perdre pour un temps si l’on veut apprendre quelque chose des êtres que nous ne sommes pas nous-mêmes. » — Le gai savoir
« Ne pas confondre : les comédiens périssent faute d’être loués, les hommes vrais faute d’être aimés. » — La Volonté de puissance
« Ma seule ambition de poète est de recomposer, de ramener à l’unité, ce qui n’est que fragment, énigme, effroyable hasard. » — Ecce Homo
« Ce qui m’importe, c’est l’éternelle vivacité et non pas la vie éternelle. » —
« Le royaume des cieux est un état du coeur. » —
« Si nous nous trouvons tellement à l’aise dans la pleine nature, c’est qu’elle n’a pas d’opinion sur nous. » —
« Une âme délicate est gênée de savoir qu’on lui doit des remerciements, une âme grossière, de savoir qu’elle en doit. » —
« Nombreux sont opiniâtres en ce qui touche la voie une fois prise, peu en ce qui touche le but. » —
« Une heure d’ascension dans les montagnes fait d’un gredin et d’un saint deux créatures à peu près semblables. La fatigue est le plus court chemin vers l’égalité, vers la fraternité. Et durant le sommeil s’ajoute la liberté. » —
« Qui voit peu voit toujours trop peu ; qui entend mal entend toujours quelque chose de trop. » —
« Le christianisme a donné du poison à boire à Eros. Il n’en est pas mort, mais il a dégénéré en vice. » —
« L’art et rien que l’art, nous avons l’art pour ne point mourir de la vérité. » —
« La foule est une somme d’erreurs qu’il faut corriger. » —
« Beaucoup trop d’hommes viennent au monde : l’État a été inventé pour ceux qui sont superflus. » —
« Ne vaut-il pas mieux tomber entre les mains d’un meurtrier que dans les rêves d’une femme en rut ? » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Si tu plonges longtemps ton regard dans l’abîme, l’abîme te regarde aussi. » —
« Il faut quitter la vie comme Ulysse quitta Nausicaa – en la bénissant plus qu’en l’aimant. » —
« Qui trop combat le dragon devient dragon lui-même. » —
« L’injustice ne se trouve jamais dans les droits inégaux, elle se trouve dans la prétention à des droits égaux. » —
« L’homme véritable veut deux choses : le danger et le jeu. C’est pourquoi il veut la femme, le jouet le plus dangereux. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« Toute vertu a des privilèges, par exemple celui d’apporter au bûcher d’un condamné son petit fagot à soi. » —
« La perspective certaine de la mort pourrait mêler à la vie une goutte délicieuse et parfumée d’insouciance – mais, âmes bizarres d’apothicaires, vous avez fait de cette goutte un poison infect, qui rend répugnante la vie toute entière ! » —
« La terre a une peau et cette peau a des maladies ; une de ces maladies s’appelle l’homme. » —
« Ce qui me bouleverse, ce n’est pas que tu m’aies menti, c’est que désormais, je ne pourrai plus te croire. » —
« Les plus grands naissent posthumes. » —
« Parmi toutes les variétés de l’intelligence découvertes jusqu’à présent, l’instinct est, de toutes, la plus intelligente. » — Par-delà le bien et le mal
« Doué d’une vue plus subtile, tu verras toutes les choses mouvantes. » — La Volonté de puissance
« Il faut deviner le peintre pour comprendre l’image. » — Schopenhauer
« La mission suprême de l’art consiste à libérer nos regards des terreurs obsédantes de la nuit, à nous guérir des douleurs convulsives que nous causent nos actes volontaires. » —
« Il n’y a qu’un seul monde et il est faux, cruel, contradictoire, séduisant et dépourvu de sens. Un monde ainsi constitué est le monde réel. Nous avons besoin de mensonges pour conquérir cette réalité, cette « vérité ». » —
« Tant que la vie est ascendante, bonheur et instinct sont identiques. » — Le crépuscule des idoles
« Une oeuvre d’art n’est lisible que par approfondissements successifs. » —
« Vivre de telle sorte qu’il te faille désirer revivre, c’est là ton devoir. » — Fragments posthumes
« Celui qu’entoure la flamme de la jalousie, celui-là en fin de compte, pareil au scorpion, tourne contre lui-même son dard empoisonné. » —
« La connaissance tue l’action, pour agir il faut que les yeux se voilent d’un bandeau d’illusion. » — La naissance de la tragédie
« Si vous ne pouvez être des saints de la connaissance, soyez-en au moins les guerriers. » —
« Ce qui découle du pessimisme, c’est la doctrine de l’absurdité de l’existence. » — La Volonté de puissance
« Nous avons la ressource de l’art de peur que la vérité ne nous fasse périr. » —
« La croyance que rien ne change provient soit d’une mauvaise vue, soit d’une mauvaise foi. La première se corrige, la seconde se combat. » —
« Un animal grégaire, un être docile, maladif, médiocre, l’Européen d’aujourd’hui ! » — Par-delà le bien et le mal
« On commence à deviner ce que vaut quelqu’un quand son talent faiblit, quand il cesse de montrer ce qu’il peut. Le talent peut être un ornement, et l’ornement une cachette. » —
« Évaluer, c’est créer : écoutez donc, vous qui êtes créateurs ! C’est l’évaluation qui fait des trésors et des joyaux de toutes choses évaluées. » —
« L’admiration d’une qualité ou d’un art peut être si forte qu’elle nous empêche de nous efforcer d’en obtenir la possession. » — Humain, trop humain
« Notre caractère est déterminé par l’absence de certaines expériences plus encore que par celles que l’on fait. » — Humain, trop humain
« Veux-tu avoir la vie facile ? Reste toujours près du troupeau, et oublie-toi en lui. » —
« Cupidon est avant tout un petit régisseur de théâtre. » —
« Tous ceux qui sont habitués au succès sont pleins d’astuces pour présenter toujours leurs défauts et leurs faiblesses comme de la force apparente : ce pourquoi ils doivent les connaître particulièrement bien. » — Humain, trop humain
« Je suis corps tout entier et rien d’autre ; l’âme n’est qu’un mot désignant une parcelle du corps. » — Ainsi parlait Zarathoustra
« La sottise chez les femmes, c’est ce qu’il y a de moins féminin. » —
« L’amour est l’état dans lequel les hommes ont les plus grandes chances de voir les choses telles qu’elles ne sont pas. » —
« Le désir est signe de guérison ou d’amélioration. » — Humain, trop humain
« Avoir honte de son immoralité, c’est un premier degré de l’échelle ; arrivé en haut, on aura honte aussi de sa propre moralité. » — Par-delà le bien et le mal
« Atteindre son idéal, c’est le dépasser du même coup. » — Par-delà le bien et le mal
« Faible serait l’attrait de la connaissance, s’il n’y avait pas tant de pudeur à vaincre pour y parvenir. » — Par-delà le bien et le mal
« Le bonheur, quel qu’il soit, apporte air, lumière et liberté de mouvement. » — Aurore
« Parler beaucoup de soi est un moyen de se dissimuler. » — Par-delà le bien et le mal
« Il n’y a pas de phénomènes moraux, rien qu’une interprétation morale des phénomènes. » — Par-delà le bien et le mal
« Il suffit de forger des noms nouveaux, de nouvelles appréciations et de nouvelles probabilités pour créer à la longue aussi des « choses » nouvelles. » — Le gai savoir
« Expérimenter, c’est imaginer. » — Aurore
« Quand la paix règne, l’homme belliqueux se fait la guerre à lui-même. » — Par-delà le bien et le mal
« Ce n’est pas l’intensité, c’est la durée d’un grand sentiment qui fait l’homme supérieur. » — Par-delà le bien et le mal
« Nul ne ment autant qu’un homme indigné. » —
« Peu de gens sont faits pour l’indépendance, c’est le privilège des puissants. » —
« Ne faut-il pas commencer par se haïr, lorsque l’on doit s’aimer. » —
« L’enfance est innocence mais aussi négligence, c’est un recommencement, un jeu, une roue libre, un premier mouvement, un Oui Sacré. » —
« La connaissance tue l’action, pour agir il faut être obnubilé par l’illusion. » — La naissance de la tragédie
« Dieu est-il une pure et simple invention, une astuce du Diable ? » — Humain, trop humain
« On ne reste philosophe qu’en se taisant. » — Humain, trop humain
« Les médecins les plus dangereux sont ceux qui, comédiens nés, imitent le médecin-né avec un art consommé d’illusion. » — Humain, trop humain
« La nature et l’histoire sont foncièrement immorales. » — Aurore
« Si l’on comprenait à l’aide de la raison comment peut être clément et juste ce Dieu qui fait preuve de tant de colère, à quoi servirait la foi ? » — Aurore
« Celui qui se sait profond s’efforce d’être clair ; celui qui voudrait sembler profond à la foule s’efforce d’être obscur. » — Le gai savoir
« Le plus important des événements récents, le fait que Dieu est mort, commence déjà à projeter sur l’Europe ses premières ombres. » — Le gai savoir
« La moralité, c’est l’instinct du troupeau chez l’individu. » — Le gai savoir
« La vie n’est désormais plus conçue par la morale : elle veut l’illusion, elle vit d’illusion. » — Par-delà le bien et le mal
« Tout esprit profond a besoin d’un masque. » — Par-delà le bien et le mal
« Il faut se garder du mauvais goût d’avoir des idées communes avec beaucoup de gens. » — Par-delà le bien et le mal
« Ce qui peut être commun est toujours de peu de valeur. » — Par-delà le bien et le mal
« Les douceurs et les frissons sont réservés aux âmes subtiles. » — Par-delà le bien et le mal
« On a mal regardé la vie, quand on n’a pas aussi vu la main qui tue en gant de velours. » — Par-delà le bien et le mal
« On commence à se méfier des personnes très avisées dès qu’elles sont embarrassées. » — Par-delà le bien et le mal
« Quand on veut dresser sa conscience, elle vous embrasse, en vous mordant. » — Par-delà le bien et le mal
« Celui qui lutte contre les monstres doit veiller à ne pas le devenir lui-même. » — Par-delà le bien et le mal
« Les poètes manquent de pudeur à l’égard de leurs aventures : ils les exploitent. » — Par-delà le bien et le mal
« Ce sont les instincts les plus élevés qui poussent l’individu en dehors et bien au-dessus de la moyenne. » — Par-delà le bien et le mal
« L’intellectualité supérieure et indépendante, la volonté de solitude, la grande raison apparaissent comme des dangers. » — Par-delà le bien et le mal
« Tout ce qui élève l’individu au-dessus du troupeau, tout ce qui fait peur au prochain s’appelle Mal. » — Par-delà le bien et le mal
« Il faut mettre en question la valeur même des valeurs morales. » — Par-delà le bien et le mal
« Pour vivre seul, il faut être une bête, ou un dieu, dit Aristote. Reste un troisième cas, il faut être les deux à la fois : philosophe. » — Par-delà le bien et le mal
« Qui ne sait mettre sa volonté dans les choses, y met au moins un sens : cela revient à croire qu’une volonté s’y trouve déjà. » — Le crépuscule des idoles
« Qu’est-ce que le bonheur ? Le sentiment que la puissance croît, qu’une résistance est en voie d’être surmontée. » — L’Antéchrist
« Qu’est-ce qui est mauvais ? Tout ce qui vient de la faiblesse. » — L’Antéchrist
« Là où la volonté de puissance fait défaut, il y a déclin. » — L’Antéchrist
« Un peuple est perdu lorsqu’il confond son devoir avec l’idée du devoir en général. » — L’Antéchrist
« Je ne saurais voir dans l’athéisme un résultat, un événement : il est chez moi instinct naturel. » — Ecce Homo
« Ce que nous faisons dans notre intérêt ne doit nous rapporter aucun compliment d’ordre moral, ni de la part des autres, ni de la nôtre. » — Aurore
« Le remords est, comme la morsure d’un chien contre la pierre, une bêtise. » — Humain, trop humain